Les réseaux sociaux, véritables vitrines de la vie moderne, ont révolutionné la manière dont nous communiquons, partageons et interagissons. Cependant, derrière cette façade d’innovations se cache une réalité préoccupante : la dépravation des mœurs. Ce phénomène, qui prend racine dans l’utilisation massive et irresponsable des plateformes numériques, soulève des questions prioritaires sur l’impact de ces outils sur les valeurs morales et culturelles, particulièrement en Afrique.
Mieux comprendre le phénomène
Avec près de cinq milliards d’utilisateurs dans le monde en 2025, les réseaux sociaux sont devenus omniprésents. Leur objectif principal est de capter l’attention humaine et de la monétiser, souvent en exploitant des contenus moralement ou émotionnellement évocateurs.
Cette dynamique amplifie des comportements tels que la recherche de statut social, les conflits intergroupes et même l’indignation publique. En Afrique, où les valeurs traditionnelles jouent un rôle central dans la cohésion sociale, cette évolution numérique a des répercussions profondes.
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Historiquement, les sociétés africaines étaient réputées pour leur adhésion à des normes morales strictes. Cependant, l’essor des plateformes comme Instagram, Facebook ou TikTok a introduit une culture où l’immoralité peut devenir un outil de visibilité ou même de profits.
C’est l’exemple des vidéos non censurées ou des publications provocantes fréquemment partagées dans l’espoir d’attirer l’attention et de gagner un statut de célébrité. Ces pratiques remettent en question les tabous culturels autrefois respectés.
En parallèle, le contenu diffusé sur les réseaux sociaux reste accessible indéfiniment.
Contrairement aux médias traditionnels comme la télévision ou le cinéma, les publications en ligne peuvent atteindre des millions d’utilisateurs instantanément et facilement. Cela rend difficile la régulation des contenus immoraux et exacerbe leur impact sur les jeunes générations africaines.
Notons que selon un rapport de l’UNICEF (2023), près de 45 % des adolescents africains disent avoir été exposés à du contenu inapproprié en ligne, souvent avant l’âge de 15 ans. À l’échelle mondiale, une étude de Statista (2024) révèle que 68 % des jeunes utilisateurs (13-24 ans) sont confrontés régulièrement à des publications à caractère sexuel ou provocateur sur TikTok, Instagram ou Facebook.
Des cas pratiques de quelques victimes des réseaux sociaux
Les conséquences de cette dépravation ne se limitent pas à une simple perte de valeurs morales ; elles affectent directement la vie des individus. En Afrique et dans d’autres régions du monde, certains ont payé un lourd tribut à cause de leur activité sur les réseaux sociaux.
Une enseignante brisée par une fausse accusation virale
En 2022, au Kenya, une enseignante de Kisumu, Margaret Ochieng, a vu sa vie basculer après la diffusion d’une vidéo sortie de son contexte. Dans cette séquence de dix secondes, elle est filmée en train de gronder un élève. Partagée d’abord sur TikTok avec une légende accusatrice « Elle bat les enfants comme des animaux » , la vidéo devient virale, atteignant plus de 1,5 million de vues en moins de 48 heures.
Les internautes, sans chercher à vérifier les faits, l’ont prise pour cible : injures, menaces de mort, publication de ses coordonnées personnelles… Margaret a été suspendue temporairement par son établissement, malgré l’absence de plainte formelle des parents concernés. Une enquête ultérieure a révélé que la scène avait été manipulée et qu’elle n’avait jamais levé la main sur l’enfant.
Mais le mal était fait. En quelques jours, elle a dû quitter sa ville, faire supprimer ses comptes personnels, et se faire suivre psychologiquement après avoir été au bord de la dépression.
Les jeunes Africains face aux défis numériques
En Afrique subsaharienne, la montée en flèche de l’utilisation des réseaux sociaux par les jeunes soulève également des préoccupations. Bien que ces plateformes offrent des opportunités économiques et éducatives, elles sont souvent associées à une diminution des interactions sociales directes et à une augmentation des problèmes de santé mentale. Les contenus immoraux ou provocants amplifient ces effets négatifs en normalisant des comportements autrefois considérés comme déviants.
Radicalisation en ligne
Les réseaux sociaux sont aussi devenus un outil puissant pour les groupes extrémistes tels que Boko Haram ou Al-Shabaab. Ces organisations utilisent ces plateformes pour recruter et diffuser leur propagande auprès de jeunes Africains vulnérables. Cette radicalisation numérique illustre une autre facette inquiétante du phénomène : l’exploitation morale à des fins destructrices au vu et au su de tous.
Le rôle des parents et des États
Les parents ont-ils finalement démissionné de l’éducation de leurs enfants ? La question reste posée. Néanmoins, la réalité en dit long sur les faits et gestes de chacun. Selon plusieurs analystes, ce n’est pas une question de démission mais d’influence. Beaucoup de parents ont pris d’assaut les réseaux sociaux et s’adonnent à la dépravation des mœurs. Entre clashs à langage dépourvu de moral, des injures publiques, des propos diffamatoires et l’exhibition à outrance du corps, plus rien ne va.
Artistes, supposés influenceurs et compagnie n’en font qu’à leur tête. Et presque personne ne frappe du poing sur la table pour réclamer la cessation du désordre. Pendant ce temps, de nombreux États semblent aussi ne pas en faire une priorité.
Doit-on réguler ou supprimer les réseaux sociaux ?
Si d’aucun estiment qu’il faut supprimer les réseaux sociaux, d’autres pensent que c’est chimérique. Les réseaux sociaux étant entrés dans les habitudes avant des bienfaits à n’en point finir.
Mais en régulant, la loi doit sévir. Chaque internaute doit être sensibilisé sur le code pénal de son pays. En cas d’abus, la sanction ne pourra plus étonner. C’est le même point de vue qu’avance Joël, un commerçant en ligne pour qui la régulation est une vraie urgence pour garantir un internet sain.
« Nous vivons aujourd’hui grâce aux réseaux sociaux. Nous y faisons toutes nos activités économiques. Si certains veulent en faire un espace de non-droit, force doit rester à la loi », nous confie-t-il.
La liberté numérique peut-elle encore rimer avec responsabilité sociale ? Alors que les réseaux sociaux redessinent les frontières de l’intimité, de l’éthique et de l’autorité, la question n’est plus de savoir s’il faut agir, mais comment. Entre des États souvent passifs avec des priorités diverses, des parents dépassés, et une jeunesse livrée à elle-même, le continent africain risque de sacrifier ses valeurs sur l’autel du buzz et du like. Réguler, éduquer, ou interdire ? Et si la vraie révolution, ce n’était pas technologique, mais morale ?