Les Togolais sont devenus de grands utilisateurs des Virtual Private Network (VPN), ces outils créant une connexion sécurisée et cryptée entre un appareil et Internet, agissant comme un tunnel privé pour les données. Depuis que les autorités ont restreint l’accès aux plateformes sociales comme YouTube ,Tiktok , Facebook et Telegram, ils ont pu se connecter malgré les difficultés techniques.
Le contexte
Tout part d’un fait, le Togo est secoué par des manifestations qui ont fait, au moins, sept morts selon plusieurs organisations de la société civile. Bien que le gouvernement n’ait pas fait de bilan chiffré , il n’en demeure pas moins que les conséquences néfastes de ces manifestations pèsent sur le panier de la ménagère.
Pour une fois de plus, de millions de Togolais ayant régulièrement accès à Internet par wifi ou par forfait internet se retrouvent sur le carreau. Leur droit à l’information, dans un monde devenu un village planétaire est désormais remis en question pour les autorités togolaises.
Et pour s’en sortir, les VPN sauvent plus d’un. En effet, grâce à ces outils , plus performants selon que vous soyez abonnés ou non, de nombreuses personnes se connectent de nouveau surtout à TikTok, devenu un peu comme la « la chaîne de télévision par excellence du 21 ème siècle ». Une alternative mais aussi des indignations, des frustrations et une colère qui ne sauraient être mesurés à l’aube d’un appareil électronique.
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Les VPN les plus utilisés ou du moins les plus recherchés d’après Google Trends sont entre autres, secure VPN, Warp VPN, Tuxler VPN, Planet VPN, Thunder VPN, Rise VPN, Nord Vpn, Planet VPN, et la liste est longue.
Les Togolais, indignés, des dénonciations enregistrées
Partout sur les réseaux sociaux, l’indignation se lit au travers des publications. Les quelques personnes dont les VPN fonctionnent plus ou moins que la moyenne profitent pour faire des vidéos sur Tiktok.
L’ironie et une teinte d’humour s’installent malgré le poids des restrictions. A longeur de journée, certains disent être en Allemagne, France, États-Unis, Belgique, faisant référence aux pays dont les serveurs des VPN se trouvent.
Et pendant ce temps, les langues se délient. « Internet n’est pas un luxe, c’est une nécessité dans un monde très connecté. Il permet au petit Togolais de faire l’e-commerce sur TikTok et Facebook. Alors pourquoi restreindre ces app? Mais pourquoi tout ceci ? Même avec VPN c’est un problème. Pff », lit-on sur la page Facebook du journaliste Anani Sossou.
Pour sa part, Internet Society chapitre Togo ne s’est pas tu sur la situation. Dans un communiqué, l’organisation a mis à nu les multiples dysfonctionnements constatés du 26 au 28 juin correspondant aux jours des dernières manifestations.
L’organisation internationale Internet Society (ISOC) a fait part de plusieurs anomalies techniques affectant la qualité de la connectivité, avec un impact direct sur les services numériques, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la finance et de la communication. Ces dysfonctionnements se traduisent par une baisse significative du débit, des coupures intermittentes, ainsi qu’un accès restreint à certains services en ligne.
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Pour sa part, la Ligue des Consommateurs du Togo (LCT), a, dans un communiqué en date de ce 2 juillet, la LCT a fait part de sa profonde inquiétude face aux restrictions d’accès et aux ralentissements ciblés des réseaux sociaux observés sur l’ensemble du territoire national depuis le 26 juin 2025. Ces perturbations constituent une atteinte grave à la liberté d’expression, un droit fondamental garanti par la Constitution togolaise et protégé par plusieurs conventions internationales.
Même son de cloche du côté de Lucien Koffi AGBEKO, économiste, éducateur et entrepreneur. Sur sa page Facebook, il n’est pas passé par quatre chemins pour s’adresser au gouvernement togolais.
Dans une publication il a fait savoir que, « Restreindre l’accès à Internet n’est pas la solution. C’est une fuite en avant. Limiter la connexion dans un contexte de tension, c’est vouloir éteindre un feu en cassant le thermomètre. Ce n’est pas Internet qui crée les colères. Ce sont l’injustice, l’inégalité, le silence des autorités face à la souffrance du peuple. L’histoire récente de nombreux pays l’a montré : couper Internet n’étouffe pas les cris, elle les transforme en explosions silencieuses, puis en tempêtes imprévisibles. Elle isole davantage le peuple, ralentit l’économie informelle, frappe les petits vendeurs en ligne, les étudiants, les freelances, les créateurs de contenu, les porteurs de projets — bref, les jeunes qui se battent dignement pour leur survie ».
Tout en appelant les autorités à rester à l’écoute de la jeunesse pour répondre à leurs préoccupations, l’entrepreneur fait une série de propositions. « J’en appelle à nos autorités : Au lieu de couper Internet, rétablissez le lien avec le peuple. Au lieu de censurer, clarifiez, répondez, réparez.
Car ce peuple-là n’est pas votre ennemi. Il est votre raison d’être », a-t-il recommandé. Des appels de ce genre ne manquent pas sur les réseaux sociaux. Mais, seront-ils écoutés par les concernés ? Que retenir de l’histoire récente du pays en matière de coupure/ restriction d’accès à Internet ?
Le Togo récidive malgré les sanctions liées aux coupures/ restrictions d’internet
Déjà en 2020, la Cour de Justice de la CEDEAO avait condamné l’État togolais pour des coupures d’internet survenues en 2017. Cette décision avait clairement établi que de telles restrictions violent le droit à la liberté d’expression.
En effet, l’année 2017 n’a pas été de tout repos pour le pouvoir de Faure Gnassingbé. L’opposant Tikpi Atchadam aujourd’hui en exil a mobilisé des milliers de Togolais sur toute l’étendue du territoire pour faire tomber le régime en place. Ce contexte de crise socio-politique a été aussi marqué par de graves perturbations d’internet, à une période où internet devenait de plus en plus en vogue avec la création « timide » de nouveaux métiers.
La Cour de justice de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) a jugé « illégales » les coupures d’internet décidées par l’Etat togolais en marge des manifestations populaires de 2017.
Les coupures d’internet, objet de la plainte déposée auprès de la Cour par sept ONG, ont eu lieu du 5 au 10 septembre 2017 et du 19 au 21 du même mois.
La Cour a condamné le gouvernement à verser une amende de deux millions de Fcfa (400 dollars) à chacun des plaignants.
8 ans après, les vieux démons refont surface. Or, sur une population de 9 millions d’habitants, le Togo compte maintenant environ 3,56 millions d’utilisateurs d’Internet, ce qui représente une pénétration d’environ 37% de la population. Le pays compte également à peu près 934 mille utilisateurs de réseaux sociaux, soit 9,7% de la population. Malgré ces chiffres, environ 47% de la population togolaise reste non connectée à Internet.
L’accès à internet n’étant plus un luxe, sa restriction/ coupure peut-elle réellement être justifiée ?
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