Dans la culture africaine, on dit souvent : “Ce qu’un vieux peut voir assis, même debout, le jeune ne pourra voir cela”. Et si aujourd’hui, les parents, voire les grand-parents s’évertuent à donner des conseils, surtout sur la vie sexuelle de leurs progénitures, c’est pour éviter des maladies mortelles liées à des phénomènes mystiques redoutables, mais méconnus, comme “Alokpli”.
En Afrique de l’Ouest, et plus particulièrement au Togo, un mot fait frémir les oreilles des anciens comme des jeunes : Alokpli. Ce terme issu de la langue éwé, souvent traduit par “commensalité des rivaux”, désigne un phénomène aussi mystique que redoutable, surtout pour la nouvelle génération, celle de TikTok et des Snaps.
À mi-chemin entre mal mystique et réalité sociale, ce fléau tue en silence et vous saurez pourquoi !
Quand le tabou devient tueur
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Alokpli n’est pas un sujet de discussion léger. Selon les croyances populaires, ce phénomène se déclenche entre deux amis ayant eu des relations sexuelles avec la même personne, souvent une femme, que ce soit de manière consciente ou non. Ce qui pourrait être perçu ailleurs comme une simple coïncidence devient ici un interdit majeur, aux conséquences potentiellement mortelles.
Le scénario typique est glaçant : deux amis se retrouvent autour d’un repas, sans se douter qu’ils ont partagé la même partenaire. Peu après, l’un d’eux est pris de violentes crises de hoquets pouvant aller jusqu’à l’étouffement. Les femmes ne sont pas épargnées, même si leur cas est souvent négligé. Chez les femmes, les effets sont plus lents mais tout aussi destructeurs : maladies chroniques, malchances répétées, infertilité, voire folie.
Une explication mystique
En Afrique, les interdits sexuels ne sont pas de simples recommandations morales : ils sont des piliers sociaux. L’échange involontaire ou volontaire d’un ou une partenaire dans un même cercle social est perçu comme un acte de trahison vis-à-vis de l’harmonie du groupe. Alokpli agit alors comme une forme de justice immanente, une sanction invisible pour avoir brisé l’équilibre communautaire.
La science a aussi tenté de donner une lecture plus rationnelle du phénomène. Selon lui, il s’agirait d’une forme de magnétisme entre les individus, provoqué par la charge énergétique laissée dans le corps de la femme. Ainsi, lorsqu’un des amis est malade et que l’autre le visite, l’échange magnétique pourrait être le déclencheur fatal. Une théorie controversée, mais qui tente de poser un cadre scientifique autour d’un fait encore largement perçu comme mystique.
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Des voix jeunes partagées
Chez les jeunes, le phénomène divise. Certains, comme Kouevi considèrent Alokpli comme un mythe : “une superstition née de la peur, pour maintenir l’ordre dans les groupes”. Pour lui, ces règles ont avant tout une fonction sociale : dissuader les comportements jugés déviants.
D’autres, comme Monique, y croient dur comme fer. “J’ai vu mon cousin mourir après avoir partagé la même copine qu’un ami. Ce n’est pas une blague. Ce truc tue”, témoigne-t-elle.
Des traitements traditionnels encore utilisés
Lorsqu’il est détecté tôt, Alokpli peut être solutionné, affirment certains tradipraticiens. Les racines d’hysope (kpatima) sont couramment utilisés, parfois même du fumier de chanvre en cas d’urgence. Ces remèdes restent cependant entourés de mystère, leur efficacité n’ayant pas été évalué ni traditionnellement, ni scientifiquement. La solution idoine serait d’aller voir les sages qui détiennent encore les secrets pour arranger de telle situation qui cause des maladies mortelles.
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À l’heure où la mondialisation banalise les rapports humains et où les réseaux sociaux encouragent des comportements sexuels plus libres, Alokpli rappelle brutalement que certaines frontières culturelles demeurent. Qu’on y croie ou non, le récit de ce phénomène pystique participe d’un réel besoin de régulation sociale, et d’un appel à la responsabilité.
Qu’il s’agisse d’un mythe culturel, d’un concept psychosomatique ou d’un réel phénomène bioénergétique, cette affaire continue de hanter l’imaginaire collectif. Son impact sur la jeunesse est tangible, entre peurs, pertes humaines et angoisses sociales. En attendant une véritable étude scientifique approfondie, chacun reste libre de croire à ce qu’il veut. Mais comme le dit un sage Bassar :”chacun sait pourquoi il vit”. Et surtout, comment il peut éviter de mourir pour si peu.