Réseaux sociaux en Afrique : À la recherche de l’équilibre entre haine en ligne et malparlage

Faisant partie intégrante de notre quotidien, les réseaux sociaux peuvent aujourd’hui être considérés comme des modes de vie à part entière. De l’accès à l’information à l’interconnexion, en passant par la libéralisation de la parole, ces plateformes présentent des avantages indéniables et en Afrique, leur mode d’emploi ne change pas pour autant. Toutefois, il urge de rappeler que dans cet eldorado, se dissimule aussi une certaine hostilité.

Sur les réseaux sociaux, la liberté d’opinion se confond notamment à la haine et sous sa forme décomplexée, mais quoique destructive, elle est même désignée malparlage ; un mot emprunté au jargon ivoirien. La haine en ligne prend par ailleurs de multiples facettes, mais reste une menace pour la vie sociale et le bien être des utilisateurs.

La haine en ligne et ses différentes formes

Quelques formes d’expression de la haine sur les réseaux sociaux en Afrique.

Les commentaires acerbes ou encore le malparlage

Devenue décomplexée sous l’appellation malparlage, la haine en ligne prend quelquefois la forme de contenus violents et de commentaires acerbes sous tout type de publication. Pire, les utilisateurs rivalisent de celui qui aura le commentaire le plus virulent et ce comportement est généralement motivé par l’envie de démontrer un supposé sens de l’humour et d’attirer l’attention sur soi.

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Un exemple palpable de haine en ligne

Qu’il s’agisse d’attaquer gratuitement une personne sur son physique, ou de choisir l’insulte facile et la vulgarité plutôt que la critique constructive pour exprimer un point de vue, les méthodes employées alimentent la haine de façon délibérée ou non. Et pendant que les auteurs se réjouissent de leurs likes, les victimes elles, souffrent en silence.

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Un exemple palpable de haine en ligne

Influence et haine font souvent bon ménage

De nos jours le titre Influenceur est employé à toutes les sauces sur les réseaux sociaux. Et parmi la multitude de personnes se réclamant de cette profession, certains ont fait de la haine en ligne, leur fonds de commerce.

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Jamais en manque de cible, ces influenceurs tout feu tout flamme ont pour habitude d’insulter à tout va dans des vidéos live où la vie privée et la dignité n’ont plus aucune importance. Et pourtant, ces créateurs de contenus violents ont un impact significatif sur leurs communautés.

Le plus lourd tribut pour les célébrités

Jugées sans cesse, les célébrités paient décidément un lourd tribut dans la prolifération de la haine en ligne. Le moindre de leurs gestes est passé au crible et quelquefois, même l’admiration s’exprime à travers des commentaires blessants. En outre, les célébrités font face au défi des fausses nouvelles en tout genre, certaines allant jusqu’à des rumeurs de décès infondées.

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Un exemple palpable de haine en ligne

Et pour se justifier de ces comportements désolants, certains utilisateurs cherchent à normaliser le fait qu’une personnalité publique doive être préparée à tout. Mais n’est-on pas humain avant d’être connu ?

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Un exemple palpable de haine en ligne

Comment les réseaux sociaux sont-ils devenus des terreaux fertiles pour la haine ?

On note des origines et causes variées.

La connectivité facile, point de départ

Depuis quelques années, l’Afrique connait une progression louable dans le déploiement des technologies destinées à rendre l’internet haut-débit plus abordable. Ce faisant, l’accès aux réseaux sociaux s’est libéralisé, donnant lieu à une explosion des chiffres d’utilisation en Afrique. Des utilisateurs peu responsables ont ainsi pu se frayer un chemin vers ces plateformes qu’ils considèrent comme des espaces de récréation exempts de contrôle.

L’anonymat, la première plaie des réseaux sociaux

Par essence, les réseaux sociaux permettent à des connaissances de se retrouver et d’échanger plus facilement, et ce, peu importe la distance. Cependant, cette utilisation traditionnelle, impliquant une inscription honnête (avec un vrai nom et une vraie photo de profil) tend à disparaitre.

Les faux comptes et par extension des pages, pullulent ainsi abondamment, car pouvant servir de bouclier pour les individus malintentionnés. Cachés derrière des avatars, ceux-ci n’hésitent pas à exprimer des opinions haineuses, comptant sur un anonymat relatif ou une sorte de protection contre les conséquences directes.

La course effrénée au buzz

Les réseaux sociaux vivent aujourd’hui au rythme du buzz et de la viralité, et pour devenir le prochain à faire sensation, certains utilisateurs sont prêts à dépasser les limites, quitte à choquer. L’une des techniques employées dans ces cas consiste en des attaques frontales, allant jusqu’à empiéter sur le terrain privé des victimes.

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Et toujours pour plus de buzz, la désinformation est devenue la chose la mieux partagée sur les réseaux sociaux. Pour attirer l’attention, d’autres utilisateurs peu scrupuleux se plaisent à créer de fausses nouvelles, dont certaines alimentent les tensions entre communautés ou groupes de personnes en tout genre.

Des politiques de modération et de régulation peu efficaces

Les réseaux sociaux disposent tous d’une politique de modération, mais entre les règles préétablies et leur application réelle, il existe souvent un fossé. Dans le contexte africain, la modération des contenus haineux devient d’ailleurs plus laxiste en raison de cadres juridiques et réglementaires faibles.

Des causes aux conséquences

La haine en ligne a des conséquences silencieuses, mais dévastatrices sur les sociétés africaines. Elle crée notamment un cercle vicieux dans lequel la stigmatisation et la discrimination fusionnent pour accoucher des faits de violence dans la vie réelle.

La peur et l’intimidation deviennent alors la hantise des groupes de personnes ciblées, mais les conséquences les plus néfastes sont d’ordre psychologique. En effet, le déferlement de haine peut porter une atteinte à la santé mentale des personnes prises pour cible, entraînant stress, anxiété et dépression.

Dans un tout autre registre, la haine en ligne accélère aussi la polarisation sociale et la fragmentation de nos sociétés. Les préjugés et les stéréotypes s’accentuent, puis les divisions deviennent plus profondes, rendant la cohésion et l’inclusion sociale plus difficiles.

Péril en la demeure; comment faire face à la haine en ligne ?

Le combat contre la haine en ligne devrait partir d’une prise de conscience collective, chaque partie concernée étant appelée à prendre les responsabilités qui sont siennes. Cela débute sans doute par les utilisateurs qui se doivent de prendre la mesure des conséquences néfastes de cette haine souvent camouflée en marlparlage. Il est par ailleurs important de cesser le partage de ces types de contenus et de les signaler massivement.

En outre, une grande part de responsabilité incombe aux plateformes de médias sociaux qui doivent renforcer leurs politiques de modération de contenu. Cela passe par un investissement dans les technologies et dans des équipes imprégnées du contexte africain, afin de détecter et de supprimer efficacement les contenus haineux. À cela s’ajoute la nécessité d’une meilleure transparence au niveau des algorithmes des réseaux sociaux.

D’autre part, il revient aux gouvernements d’adopter et d’appliquer des lois efficaces contre la haine en ligne, mais tout aussi respectueuses des libertés. En Côte d’Ivoire par exemple, la PLCC (Plateforme de Lutte Contre la Cybercriminalité) a initié depuis quelques années une croisade contre les débordements en ligne et celle-ci semble porter ses fruits. Mais en dehors de la loi, le combat peut aussi être mené sur le font de l’éducation avec l’intégration de la notion de citoyenneté numérique dans les programmes scolaires.

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Enfin, la sensibilisation représente également une arme farouche contre la prolifération des contenus haineux et elle peut être prise en charge aussi bien par les gouvernements que les organisations de la société civile.

En résumé, la haine en ligne est un mal profond et ses conséquences tendent malheureusement à être banalisées. Alors quel genre d’utilisateur êtes-vous sur les réseaux sociaux ? Un simple observateur ? Celui qui tire simplement avantage de ces plateformes pour se divertir ou booster ses activités ? Ou encore, un troll qui prend du plaisir à distiller de la haine sous couvert de malparlage ? Peu importe au final, car la prise de conscience mérite d’être collective pour endiguer ce phénomène et créer un environnement en ligne plus sûr et plus responsable.

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