L’Alliance des États du Sahel (AES), composée du Mali, du Niger et du Burkina Faso, poursuit sa trajectoire d’intégration régionale en franchissant un cap important : la création d’une instance judiciaire commune. Cette décision, officialisée lors d’une réunion préparatoire à Bamako le 27 mai 2025, marque une volonté claire de renforcer la coopération juridique et d’affirmer la souveraineté des États membres, en dehors des cadres régionaux traditionnels.
Les ministres de la Justice des trois pays se sont accordés sur la nécessité d’une juridiction propre à l’AES. Mamoudou Kassogué, ministre malien de la Justice, a souligné l’enjeu fondamental de cette initiative : harmoniser les cadres juridiques, combattre la criminalité transfrontalière et affranchir l’Alliance des structures extérieures. Il s’agit non seulement d’un outil juridique, mais aussi d’un symbole politique fort d’émancipation et de solidarité entre ces États sahéliens confrontés à des défis communs.
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La future instance judiciaire aura pour missions principales :
– d’harmoniser les législations nationales pour faciliter les poursuites et l’exécution des décisions judiciaires entre les pays ;
– de renforcer la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogue, la traite humaine et autres crimes transfrontaliers ;
– de consolider l’autonomie institutionnelle de l’AES en s’affranchissant des juridictions communautaires extérieures comme la Cour de justice de la CEDEAO.
Cette avancée s’inscrit dans une dynamique plus large portée par l’AES. Après la création récente de la Banque Confédérale d’Investissement et de Développement (BCID) et les discussions autour d’une monnaie commune, l’Alliance affiche une ambition claire : construire un espace politique, économique et juridique intégré, reposant sur des institutions propres.
La conférence des ministres de la Justice de l’AES, prévue à Bamako les 29 et 30 mai, devrait permettre d’en préciser les contours : structure de la juridiction, compétences, mode de désignation des juges et articulation avec les systèmes judiciaires nationaux. Si elle aboutit, cette initiative pourrait inspirer d’autres blocs régionaux en Afrique, en quête d’alternatives institutionnelles face à l’instabilité géopolitique et au déficit d’efficacité des organisations continentales existantes.